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Mondes hivernaux

Le train avance. Nous sommes le 24 décembre 2021. J’entends les bruits du train qui glisse sur les vieux et lourds rails d’acier. Je trouve ce son assez relaxant. Ce son m’aide à oublier le froid glacial qu’il fait dehors. Ce froid qui pince chaque particule de mon corps, ce froid qui souhaite que je ne puisse plus jamais bouger et que je gèle sur place. Sans parler de la neige, cette neige qui change tout le temps d’humeur. Un jour, mon monde est complètement emmitouflé de neige plus blanche que mes yeux et l’autre jour, tout a fondu, et il fait gris et triste. Je ne comprendrai jamais la neige et la neige ne me comprendra jamais. Je ferme mes yeux et je m'imagine pieds nus, dans le sable chaud, sur une plage, regardant l’horizon inconnu. Je rouvre mes yeux et me rappelle que je suis encore dans cet insipide train. Soudain, un homme s’assoit sur le siège en face de moi. Il ouvre son journal et lit. Il porte un long manteau vert forêt, des petites lunettes rondes et des bottes en cuir avec des lacets qui ont l’air de venir tout droit de la préhistoire. Il a une moustache, ma foi, bien moustachue et un chapeau melon en velours. J’ai l’impression de le connaitre, ou bien de l’avoir toujours connu. Je passe trente minutes à l’observer comme une vulgaire psychopathe. Ses yeux sont encore posés sur son journal. Une autre minute passe et je l’observe encore. Subitement, il lève ses yeux et me regarde droit dans les yeux. Je suis incapable de quitter son regard. Et puis, inopinément, je suis alors transportée. Je suis transportée dans un autre monde. Tout est en noir et blanc, je réalise par la suite que je suis à la même place, dans le même train que tout à l’heure. Je regarde les autres passagers, cherchant une solution à cette énigme. Ils sont tous habillés d’une drôle de manière; les femmes portent d’énormes manteaux de fourrure, tous aussi dramatiques que les autres. Les hommes portent des vestons, jumelés de nœuds papillon… et de chapeaux melon. Des chapeaux melon de velours… Une émotion troublante me vient, je n'arrive pas à la nommer. Je regarde à travers la fenêtre et il neige. Tout est en noir et blanc, mais la neige est plus blanche que tout le reste. Je ne saurais dire pourquoi, mais je ressens une présence dans la neige. Chaque flocon semble avoir du vécu… Peu importe… je me retourne et décide de me lever. Je cherche quelque chose. Mon esprit est en complète tempête. Plus rien n’est logique, je ne sais pas où me diriger, sans repères ni boussole. Je cherche quelque chose. Je regarde partout autour de moi. Voilà! Je trouve un journal… Je l’ouvre et regarde la date. Nous sommes le 24 décembre 1921. Pendant quelques secondes, j’arrête de respirer. Je cherche une sortie. J’ouvre une énorme porte, je suis maintenant à la fin du wagon, dehors, mes yeux sont plissés à cause de la neige qui voltige dans tous les sens. Je ne comprendrai jamais la neige et la neige ne me comprendra jamais. Le froid m’attrape, mes lèvres ne peuvent à peine bouger. Je rentre aussitôt. Je vois les hommes fumer des cigares et des enfants qui courent partout, tous bien habillés. Je retourne à mon siège. Soudain, un homme s’assoit en face de moi. C’est le même homme que tout à l’heure… Ou bien, devrais-je dire… Cent ans plus tard? Il lit son journal pendant une trentaine de minutes et ensuite, me regarde droit dans les yeux. Je suis, encore une fois, transporté dans un autre monde. Tout est revenu en couleur. Je regarde la date sur son journal : 24 décembre 2021… Mon visage devient fade et plein d’amertume… Je retrouve cette réalité. Cette si triste réalité. Je veux y retourner. Je me lève donc et pose ma main sur l’épaule de l’homme. Puis, il me regarde droit dans les yeux…



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Blogue étudiant du Collège Reine-Marie

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